5 ans après un AVC bien traité, quels sont les risques de récidive ?

Un site utilisant Réseau HU Paris Nord Val de Seine

Recherche Innovation Centres d'excellence

5 ans après un AVC bien traité, quels sont les risques de récidive ?

5 ans après un AVC bien traité, quels sont les risques de récidive ?

L’équipe du Pr Amarenco, chef du service de neurologie à l’hôpital Bichat Claude-Bernard, AP-HP, professeur à l’université Paris-Diderot – Sorbonne Université – Inserm, a étudié le risque de récidive d’un AVC pour des patients ayant bénéficié d’une prise en charge dans les 24 heures suivant la survenue d’un accident ischémique transitoire. Les chercheurs démontrent que de 1 à 5 ans le risque reste constant. Ces résultats suggèrent que la prévention de ces événements ne doit pas se concentrer que durant les premiers mois suivant l’AVC, mais doit être prolongée au moins 5 ans. 

Ils sont publiés dans le New England Journal of Medicine le 16 mai.

 Aujourd’hui, environ un accident cardio-vasculaire sur quatre est précédé d’un accident ischémique transitoire. Il peut par exemple se manifester par une paralysie d’un membre, une perte de la parole et/ou de la vue ou encore des troubles de l’équilibre. Après un AIT ou un infarctus cérébral mineur (ne donnant pas de handicap immédiat), le risque à long-terme de survenue d’un autre AVC, d’un infarctus du myocarde ou d’un décès d’origine vasculaire n’est pas connu.

Après avoir rapporté lors d’une première étude parue en 2016 dans le New England Journal of Medicine, le risque de survenue d’un accident cardio-vasculaire à un an, l’équipe s’est attachée à en mesurer le risque à 5 ans. Ces travaux ont été réalisés dans le cadre du projet international TIAregistry.org.

L’étude a été menée auprès de 3 847 patients issus de 21 pays (en Europe, Asie, Japon, Amérique Latine) entre 2009 et 2011, victimes d’un AIT ou d’un accident cérébral mineur dans les 24 heures pour 80% d’entre eux et pour les autres dans les 7 jours. L’objectif était notamment d’évaluer l’état de santé des patients, pris en charge dans une structure spécialisée, et le risque d’AVC cinq ans après la survenue de l’AIT ou d’un accident cérébral mineur. Parmi les 61 centres initiaux qui ont permis la première publication des données à 1 an, 42 ont participé au suivi des patients jusqu’à la 5ème année.

Parmi les 3 847 patients suivis 5 ans, 469 ont eu un infarctus cérébral, un infarctus du myocarde ou sont morts de problème vasculaire, soit un risque à 5 ans de 12,9%.

La moitié de ces événements est survenu au cours de la première année de suivi, la moitié est survenue entre la deuxième et la cinquième année, ce qui montre que la prévention de ces événements ne doit pas se concentrer que durant les premiers mois suivant l’AVC, mais doit être prolongée au moins 5 ans.

La survenue de ces événements reste constante au fil du temps, c’est-à-dire que le risque n’a pas tendance à s’atténuer.

À 5 ans, le risque de récidive d’AVC était de 9,5%, dont un peu moins de la moitié sont survenus entre la deuxième et la cinquième année.

Dans l’analyse, les prédicteurs d’un plus haut risque entre la deuxième et la cinquième année étaient la présence d’une cause athéroscléreuse de l’AVC- cette maladie qui bouche les artères du cœur et du cerveau par un dépôt de cholestérol- ou d’une cause embolique d’origine cardiaque (l’arythmie cardiaque étant la plus fréquente de ces causes), ou un score de risque élevé (score mixant la présence d’une hypertension artérielle, d’un diabète, d’un âge de plus de 60 ans, d’une durée de l’épisode initial supérieur à 10 minutes, ou la présence d’une paralysie ou d’un trouble du langage dans les symptômes de l’AIT).

Après un AIT ou un infarctus cérébral mineur ne laissant pas de handicap, le risque de refaire un AVC handicapant ou un infarctus du myocarde, fatals ou non, est de 6,4% la première année et de 6,4% entre la deuxième et la cinquième année. Ce résultat a été obtenu alors que tous les patients dans cette étude ont été traités de façon optimale, c’est-à-dire suivant les recommandations de traitement après un AVC.

Les auteurs préconisent de développer des stratégies de prévention encore plus efficaces pour diminuer le risque d’AVC. Parmi celles-ci, figurent de nouveaux médicaments comme ceux agissant sur le cholestérol, ou les triglycérides, ou encore des mesures d’hygiène simples comme l’exercice physique régulier (par exemple 20 à 30 minutes de vélo d’appartement tous les matins avant la douche) et la perte de poids. Comme seulement 25% des AVC sont précédés d’AIT, d’autres stratégies de détection des patients à risque devront être trouvées. La médecine connectée devrait pouvoir également contribuer à les identifier.

 

En savoir plus


  • La prise en charge des AVC

Grâce à l’avènement de la thrombolyse et de la thrombectomie, la prise en charge des AVC constitués a considérablement changé, permettant d’espérer la guérison chez près de 50% des patients traités chaque année. Cependant, au mieux 10% des AVC constitués bénéficient de ces traitements, sur les 160 000 AVC constitués en France dans une année.

Ainsi, 144 000 patients ne bénéficient pas de ces traitements, car ils arrivent trop tard à l’hôpital. La bonne prise en charge de ces patients dans des unités neuro-vasculaire améliore leur devenir.

  • Qu’est-ce qu’un AIT ?

25% des AVC constitués sont précédés d’accidents ischémiques transitoires (AIT). Un AIT correspond à des symptômes qui durent en général quelques secondes ou quelques minutes, rarement plus d’une heure, qui sont les mêmes symptômes que ceux de l’AVC (paralysie d’un bras ou d’une jambe, perte de la parole, perte de la vue d’un œil, instabilité soudaine de la position debout), caractérisés par la soudaineté de leur installation et leur régression spontanée très rapide. Comme ils ne durent pas, si le diagnostic de leur cause est fait immédiatement et si le traitement est immédiatement appliqué avant la récidive catastrophique, on peut éviter l’AVC. En quelque sorte, l’AIT est à l’AVC ce qu’est la fumée du volcan avant l’irruption volcanique.

  • Qu’est-ce que SOS-AIT à l’hôpital Bichat, AP-HP ?

Après un AIT, le risque d’AVC constitué était de 17% à 3 mois au début des années 2000, et la plupart des AVC surviennent dans les heures ou jours suivant l’AIT. Intervenir au plan diagnostique et thérapeutique juste après l’AIT est donc la meilleure opportunité d’éviter l’AVC constitué. C’est la raison pour laquelle l’équipe a développé depuis 2003 « SOS-AIT », une clinique d’AIT à l’hôpital Bichat, AP-HP disponible 24h/24, 365 jours par an, et, presque parallèlement une clinique d’AIT similaire s’est mise en place en 2004 à Oxford. Les deux équipes ont rapporté simultanément en 2007 que cette prise en charge expéditive de l’AIT permettait de réduire de 80% le risque d’AVC constitué. Cette constatation a été confirmée par un registre d’AIT international (TIAregsitry.org) mis en place, basé sur 61 cliniques d’AIT en Europe, Asie et Amérique latine, publié dans le New England Journal of Medicine en 2016.

Sources:

Five-Year Risk of Stroke after Transient Ischemic Attack or Minor Stroke

Pierre Amarenco, M.D., Philippa C. Lavallée, M.D., Linsay Monteiro Tavares, B.S.T., Julien Labreuche, B.S.T., Gregory W. Albers, M.D., Halim Abboud, M.D., Sabrina Anticoli, M.D., Heinrich Audebert, M.D., Natan M. Bornstein, M.D., Louis R. Caplan, M.D., Manuel Correia, M.D., Geoffrey A. Donnan, M.D., José M. Ferro, M.D., Fernando Gongora-Rivera, M.D., Wolfgang Heide, M.D., Michael G. Hennerici, M.D., Peter J. Kelly, M.D., Michal Král, M.D., Hsiu-Fen Lin, M.D., Carlos Molina, M.D., Jong Moo Park, M.D., Francisco Purroy, M.D., Peter M. Rothwell, M.D., Tomas Segura, M.D., David Školoudík, M.D., Ph.D., P. Gabriel Steg, M.D., Pierre-Jean Touboul, M.D., Shinichiro Uchiyama, M.D., Éric Vicaut, M.D., Yongjun Wang, M.D., and Lawrence K.S. Wong, M.D. for the TIAregistry.org Investigators*

N Engl J Med 2018, 16 mai 2018

DOI: 10.1056/NEJMoa1802712